mercredi 3 août 2016

Tandem et pourtant sirupeux

Je suis entré. Un intérieur fonctionnel et émotionnel. L’espace disponible limitait la fantaisie. La place de chaque élément devait avoir fait l’objet d’une intense réflexion et peut-être d’hésitations. Comme un tangram, l’agencement donnait l’impression qu’il n’y avait pas d’alternative au risque de rompre un équilibre. L’amour et la fonction. Le four est dans la cuisine. Le canapé est dans la salle. Le lit est dans la chambre. Les chaises entourent la table de forme ronde. Accompagnée d’un rideau aux motifs balnéaires, la douche est dans la salle de bain. Un seul coup d’œil permet de connaître la destination de chaque pièce. Je devinais que la volonté de maintenir les lieux propres et rangés était constante. Et le reste ? Le reste, c’est ce que l’on ne dit pas, ce que l’on laisse deviner, ce qui cache cet autre reste. Les choses étaient posées ici et là sur des étagères, sur des rebords, sur des chaises, sur la table, sur et contre les murs. Tu es dans tout cela. Et ailleurs. Des photographies. Collées, punaisées, accrochées, cadrées, posées. Des pointillées de ton histoire. Des déclics de la vie. Tu ne revis pas ces instants. D’ailleurs, tu n’étais pas toujours là. Tu leur souris. Ils t’entraînent parfois dans des rêveries. L’amour se heurte à l’absence. Ton regard s’éclaire à nouveau avant la douleur. Des livres serrés les uns contre les autres qui, en verticale, laissaient voir leur titre. Comme un mot croisé sans horizon. Ils semblaient attendre une main. Peut-être celle qui les déposera dans le prochain carton. Il suffirait de tirer sur la couverture pour les ouvrir à nouveau. Assis dans le canapé, j’arrête mon observation. Je ferme les yeux. J’attends. Je t’entends. Tes mouvements. C’est toi qui bouge. L’air se déplace. Tu t’approches. Tu es tout près. Peut-être me regardes-tu. Si je te le demandais, tu me répondrais pour qui tu te prends. Pourtant, je me souviens qu’un jour tu m’as dit tu es beau. Je n’ai pas pu m’empêcher d’y croire. Tu me regardais avec attention.  Tu me détaillais comme un modèle, à la recherche des ombres, des courbes, des points de chute. Tu te penches. Je n'ouvre pas les yeux de peur que tu disparaisses. 

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